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I. L’OPÉRATION DE MICRO-CREDITA. Création et utilisation des micro-crédits 1. Objectif initial Le micro-crédit est un outil financier destiné aux entrepreneurs dont les revenus sont trop faibles pour pouvoir accéder à un crédit bancaire classique. Il apparaît aussi comme la volonté d’accompagner progressivement l’essor d’une activité économique et d’en organiser une certaine surveillance. En France, le montant maximum d’un micro-crédit est de 25 000 €. Ce montant a été fixé pour répondre à des objectifs de politique économique liés à l’entreprenariat. Ce plafond est généralement celui que pratique les opérateurs de micro-crédit institutionnels. Les pratiques associatives ou coopératives situent le micro-crédit dans une fourchette de 1 000 à 15 000 €. Teriya Amitié Mali a mis en place au sein du Centre artisanal un fonds de 500 000 CFA soit environ 760 €. Cette somme de départ a pour objectif de donner naissance à plusieurs crédits à taux zéro. Ils sont souscrits aux corporations qui le souhaiteraient pour dynamiser leur commerce. Aucune augmentation de cet apport initial n’a eu lieu depuis sa création ; il était question, dans un premier temps, d’en observer l’utilisation et ses conséquences. La somme d’argent mise à la disposition du centre est supposée inciter les artisans à produire des biens même s’ils n’en n’ont pas reçu commande. Les stocks ainsi constitués sont ensuite exposés pour donner envie aux niénakas d’acheter. Autrement dit, il a pour objet premier de mettre en place une dynamique de l’offre pour remplacer la dynamique de la demande jusqu’ici dominante. Ceci permettrait au Centre artisanal de Niéna de mettre en place un commerce régulier. 2. Utilisation effective Le Centre artisanal a établi certaines conditions d’obtention des fonds pour les corporations qui malheureusement privent certaines d’entre elles des moyens d’y accéder. En effet, pour obtenir un micro-crédit, la corporation doit justifier de commandes préalablement émises. Dès lors, les seules corporations qui ont pu bénéficier sont les fondeurs, les forgerons, le bijoutier, les teinturières et les vannières. Les fondeurs et les vannières en sont à leur quatrième emprunt. Ces deux corporations sont les plus promptes à rembourser les crédits du fait de la rapidité de vente de leurs produits d’usage courant (marmites, tasses, théières, paniers...). Suite à ces constatations, ils font désormais exceptions à la règle et n’ont plus l’obligation de justifier de commandes car leur activité présente une productivité et une rentabilité constante. Malgré cette avancée, leurs bénéfices ne connaissent pas encore d’augmentation significative (Æ chiffres malheureusement). Le bijoutier, quant à lui, n’a pu rembourser que 30 000 CFA au bout des 4 mois. Ces articles ne s’écoulent pas assez vite et pendant l’hivernage, il ne réalise aucune vente. La répartition de la somme de départ (les 500 000 CFA) entre les corporations concernés se décompose comme suit : Chaque corporation peut recevoir 100 000 CFA et dispose de deux mois pour les rembourser. La plupart du temps le Centre accorde un délai et prolonge de deux mois supplémentaires l’échéance du remboursement. Ce délai écoulé, les corporations doivent reverser la somme reçue et y ajouter une taxe de 5% sur les bénéfices enregistrés grâce au crédit obtenu (le centre nous a présenté cette taxe comme un intérêt sur les bénéfices, mais par définition, la notion d’intérêt est liée au crédit même et non aux bénéfices qui en ont résultés). Cette taxe ne sera donc pas ajoutée à la somme initiale du fonds de roulement mais servira à financer les frais de fonctionnement du Centre tels que le salaire du gardien ou l’entretien des machines. B. Intérêt de l’opération de micro-crédits 1. Exemple d’utilisation et intérêt de l’opération au travers d’une corporation : les vannières Les vannières ont mis en place un mode de répartition des 100 000 CFA entre elles. Avant la mise en place du système de micro-crédits, elles achetaient leur matière première sur le marché à crédit. Depuis que l’opération de crédit a été établie, les vannières achètent leur matière première à prix comptant mais une fois leur marchandise écoulée, elles devront rembourser leur emprunt. Dès lors, on peut se demander quel est l’intérêt de remplacer un crédit par un autre. Plusieurs arguments mettent en évidence qu’un système de crédit au sein même du Centre artisanal apporte bien plus d’avantages qu’un créancier privé. En effet, le jour où l’un de leur fournisseur refusera de vendre ses marchandises à crédit, les vannières se retrouveront dans une impasse et leur commerce sera paralysé. Le micro-crédit apparaît alors ici comme une garantie de la pérennité de production car il sera toujours possible d’acheter les matières premières. De plus, on peut facilement imaginer que le créancier privé œuvre pour le bien de son entreprise et ne fait pas cas de l’entreprise de ses clients. Il n’a donc aucun intérêt à leur faciliter les remboursements et privilégiera les clients qui pourront payer. Le système de micro-crédit, de son côté, est instauré dans le but même de développer l’activité des artisans en particulier et du Centre en général. Il est donc nécessaire de permettre aux corporations de rembourser les emprunts dans des conditions plus souples pour les encourager à produire. 2. Échec de l’objectif initial Malheureusement, il semble que l’objectif de départ de l’opération de micro-crédit n’a pas été compris eu égard à la gestion qui en a été faite. Les conditions d’obtention de l’emprunt par les corporations en est l’illustration même. Les modalités exigées (les commandes préalables) n’offrent pas la possibilité de développer un esprit d’entreprise dans la mesure où les corporations dépendent toujours de la demande pour obtenir des fonds et donc produire. Ces conditions sont fondamentalement contradictoires avec l’idée même de micro-crédit. De plus, cette politique met en place un cercle vicieux dans lequel seules les corporations qui ont des commandes pourront développer leur activité. En l’espèce, moins de la moitié des corporations représentées dans le Centre artisanal a pu bénéficié de cet avantage financier. Cette utilisation du fonds, contraire à l’objectif initial, s’explique pourtant simplement. Les gestionnaires de l’opération avaient pensé que les corporations qui n’auraient pas de commandes produiraient sans pouvoir vendre par la suite et ne pourraient donc pas rembourser l’emprunt. Ils bloqueraient ainsi le fonds destiné aux micro-crédits dont les autres corporations seraient ainsi privées. Mais en l’occurrence, le problème qu’ils souhaitaient éviter demeure. En effet, le système qu’ils ont mis en place ne permet pas à toutes les corporations d’emprunter. Les conditions d’obtention des prêts bloquent elles-mêmes l’accès aux micro-crédits. En attendant, l’utilisation du fonds n’a pas permis aux corporations de produire plus que ce qui leur était commandé. Elles n’ont donc pu exposer leur production aux niénakas. Il sera donc nécessaire pour pérenniser l’opération, de sensibiliser les gestionnaires du centre aux intérêts d’une opération de micro-crédits ainsi que de les former pour une utilisation optimale. |
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