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Magali Marguin a passé cinq mois au début 2000 pour
préparer son sujet du mémoire de maîtrise de géographie.
L'attractivité de la route
Le "goudron" est le nom que les Nienakas donnent à la
route qui traverse le village.
La route nationale 7 relie Bamako à Sissako, la capitale régionale et,
au-delà, elle rejoint au sud Abidjan en Côte d'Ivoire, port dont
dépend le Mali, état privé d'accès à la mer. Elle conduit
également vers l'est à Bobodioulasso, au Burkina.
Le rôle que joue la route dans l'économie du village et, plus
largement, comment elle contribue à le modifier est le sujet du
mémoire de maîtrise de géographie soutenu par Magali Marguin à
(université de Paris I Panthéon-Sorbonne, sous la direction du
professeur Roland Pourtier.
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Pour les membres de Teriya, cette approche
objective et scientifique est un précieux apport à leur réflexion.
Magali observe que ce bourg à forte dominante agricole, le centre
adossé au "goudron", est un milieu restreint, varié, vivant
à toute heure du jour et de la nuit. L'important trafic national et
international qui traverse le bourg est créateur d'activités : les
1512 personnes qui traversent Niéna en moyenne chaque jour sont
essentiellement des citadins qui ne demandent qu'à consommer. |
L'hôtel restaurant de la gare routière |
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A cette demande répondent 104 commerçants, aidés de 106
apprentis ou employés: Les commerçants du goudron travaillent dans la
restauration (gargotiers, vendeuses de beignets, rôtisseurs), la vente
généraliste (pièces détachées, savons, tailleurs), la réparation (mécaniciens,
vulcanisateurs, forgerons) et la vente de carburants.
L'instruction apparaît comme un facteur important pour s'adapter au
milieu du goudron. Les taux de 52% d'alphabétisés ou de scolarisés
(souvent brièvement) et de 61 % se débrouillant en français sont
très supérieurs à ceux du reste du village. Plus de la moitié de ces
commerces sont situés dans un bâtiment "en dur", les autres
disposent d'installations sommaires, simple abri, étal couvert de
tôles, ou bien, dans 15% des cas, d'aucun aménagement. |
Sans pouvoir l'évaluer avec précision,
l'apport du commerce dans l'économie du village semble important. Les
responsables de la caisse communautaire "Kafo Digine" le
confirment : leur caisse est beaucoup plus riche que les autres de la
zone, avec deux fois plus d'adhérents que dans les bourgs équivalents
situés à l'écart de la route nationale.
Toutefois, être un bon commerçant n'est pas de tout repos. Il faut
savoir où se ravitailler au meilleur coût et comment attirer les
clients. Le "turn-over", lié en partie à l'absence de
formation, est important. |
La confrontation entre la tradition et la route
Le contact avec le monde est plus aisé, et les habitants de Niéna
changent progressivement face aux apports extérieurs: "L'espace mental des
références est élargi" nous dit Magali. Les voyageurs passent à Niéna,
et les Niénakas peuvent se rendre plus facilement à la ville et à la
capitale.
Mais l'intégration de nouveautés ne se fait pas sans concessions, et sans
risques également. Il faut apprendre à vivre avec la route, ses dangers, les
nombreux accidents, les trafics favorisés par la proximité de la frontière.
En particulier, l'approvisionnement en carburant est totalement et visiblement
illégal puisque, en l'absence de station-service, l'essence est vendue en
bidons au bord de la route. Une petite délinquance, s'exerçant
particulièrement les veilles de marché, quand afflue un grand nombre de
visiteurs étrangers au village, est également mise en lumière.
La route est la porte d'entrée de Niéna elle reste toujours ouverte. Il
semblerait que Niéna soit accueillante et attire beau-coup d'étrangers à
causé de sa situation géographique et des facilités d'entreprise qu'elle
offre.
Niéna aujourd'hui
Le bourg s'urbanise et Niéna n'est plus tout à fait un village
exclusivement agricole.
La population augmente : elle était de 4000 habitants en 1985, au moment de là
création de Teriya. Or, le recensement en cours devrait officialiser le statut
de ville de Niéna, avec plus de 8000 habitants.
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Tout en restant agricole, l'économie se transforme et se tourne vers le
commerce qui naît de la voie de communication. Les besoins de formation sont
plus grands.
Pour Magali, Niéna est à un tournant et, comme toute évolution, celle-ci est
porteuse d'espérances et de risques. C'est donc dans ce contexte que se situe
l'action de Teriya, avec comme enjeu d'aider le village, devenu bourgade, puis
petite ville, à saisir les chances qui s'offrent à elle grâce à son
dynamisme. Il s'agit égale-ment de l'aider à se prémunir contre les risques
liés à une urbanisation mal maîtrisée.
Magali nous alerte, nous fait réfléchir, et nous la remercions du concours
qu'elle apporte par la pertinence et le sérieux de ses travaux reposant sur
une. analyse rigoureuse d'observations conduites au cours d'un séjour de cinq
mois, au début de l'année 2000.


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