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Bilan 2006
Analyse externe ] La commercialisation ] [ Bilan 2006 ] Proposition 2007 ] Conclusion ]

 

 

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III.  SAISON 2006 : BILAN DES VOYAGES

 Au cours de l’année 2006, la CPMG a entrepris 4 opérations commerciales à destination de Mopti. Les membres de la coopérative n’ont pas pu nous renseigner sur les dates de ces opérations et les paragraphes qui suivent n’offrent pas d’indication temporelle. De plus, les documents comptables qui nous ont été transmis par la CPMG étaient désordonnés et souvent incomplets. Nous avons essayé de réorganiser ces chiffres sous la forme de comptes de résultats mais nous ne pouvons en garantir ni la justesse ni la précision. Les fonds apportés par Teriya ne figurent pas dans ces comptes de résultat car nous avons pris le parti de les considérer comme un investissement initial et non pas comme un produit d’exploitation. Vous trouverez en annexes les comptes de résultat relatifs à chacun des voyages (Annexe 1).

 Dans une première partie nous expliciterons le déroulement de chacun des voyages puis nous essaierons de mettre en lumière les facteurs clés de réussité de l’entreprise ainsi que les risques pesant sur le succès de l’opération.

 A.   Analyse des quatre voyages

 Tout au long de cette analyse il est primordial de conserver à l’esprit que la CPMG est une coopérative à but non lucratif et que l’objectif du commerce de mangue est d’assurer des revenus aux planteurs, et non de dégager des bénéfices. Si, in fine, la CPMG avait pu reconstitué l’apport initial en capital financé par l’association Teriya, l’entreprise aurait pu être considérée comme un succès. Néanmoins, si la coopérative parvient à dégager des excédents grâce au commerce de mangues elle pourrait les utiliser pour financer une politique active de développement de l’arboriculture dans la région.

1.      Premier voyage

 Le premier voyage fut le plus réussi. Le résultat financier de l’opération s’élève à 52 100 CFA ; les producteurs de mangues concernés par l’opération ont tous été payés. Grâce au financement de Teriya, la CPMG a pu payer au comptant les mangues qu’elle achetait. Par conséquent elle n’a eu aucune difficulté à réunir les 45 000 fruits nécessaires pour charger complètement son camion – de surcroît, les mangues étaient de bonne qualité. L’intégralité du chargement a donc pu être vendu à crédit à l’AAM pour un montant de 700 000 CFA.

2.      Deuxième voyage

 Les remboursements de la première vente se sont échelonnés sur une durée qu’il nous est impossible de déterminer mais on peut supposer que les membres de la CPMG sont repartis à Niena sans avoir perçu intégralement le premier versement de l’AAM. Cela signifie que, lorsqu’ils ont décidé d’entreprendre un deuxième voyage, leur trésorerie était déjà épuisée. Ceci expliquerait l’échec de cette nouvelle opération commerciale. En effet, puisque la CPMG n’était plus en mesure de payer au comptant les mangues qu’elle désirait, les conditions d’approvisionnement se sont sensiblement dégradées. Au lieu des 45 000 mangues dont elle avait besoin pour remplir son camion, elle n’a obtenu que 32 900 mangues. Inévitablement, le produit des ventes de la CPMG à Mopti fut inférieur au montant perçu lors premier voyage : 523 800 CFA contre 700 000 CFA. Au final le deuxième voyage de la CPMG s’est soldé par une perte de 75 100 CFA. Notons, malgré tout, que les producteurs ont été remboursés et que cette opération leur a assuré des revenus supplémentaires.

3.      Troisième voyage

 La troisième opération commerciale à destination de Mopti est comparable à la précédente, il est inutile de s’y attarder. Faute d’une trésorerie suffisante, la CPMG n’a pu garantir ni un approvisionnement suffisant – seulement 30 322 mangues contre les 45 000 espérée - ni l’homogénéité des fruits achetés. N’ayant obtenu que 512 500 CFA de la vente de leur marchandise, l’opération s’est soldée par une perte de 76 000 CFA. Notons, malgré tout, que les producteurs ont été remboursés et que cette opération leur a assuré des revenus supplémentaires.

4.      Quatrième voyage

 Le scénario est identique à celui du troisième voyage… mais en pire. Cette fois ce n’est pas tant la quantité de mangue obtenue qui est problématique (39 000 fruits au lieu des 45 000 escomptés) mais leur qualité. Les variétés de mangues que la CPMG a emporté ne correspondaient pas du tout aux standards de Mopti et leur vente n’a rapporté que 408 660 CFA. L’opération s’est donc soldée par une perte de 236 740 CFA. Cependant, les producteurs ont été remboursés et que cette opération leur a assuré des revenus supplémentaires. 

5.      Synthèse

 Le premier constat est positif, la CPMG a trouvé de nouveaux débouchés pour les producteurs de mangues et leurs revenus ont significativement augmenté par rapport à la saison 2005. En tout, c’est près de 740 000 CFA qui ont été répartis entre les planteurs de la coopérative. Cependant, d’un point de vue commercial, l’opération est un échec. La CPMG n’a pas réussi à dégager d’excédent financier au terme des 4 voyages, le résultat de la saison 2006 est une perte de 305 740 CFA. La quasi-totalité de l’investissement de Teriya a donc été utilisés pour compenser les déficits d’exploitation. La CPMG n’a pas réussi à créer une dynamique commerciale rentable qui lui aurait assuré une autonomie financière.

             Avant d’analyser en détail les facteurs qui ont provoqué l’échec commercial de la CPMG, nous voudrions attirer votre attention sur la question du prix de vente unitaire moyen. La CPMG nous a affirmé que le prix de vente d’une mangue de bonne qualité à Mopti s’élevait à 20 CFA (estimation basse). Pourtant, lors de son premier voyage, la coopérative à vendu son stock de 45 000 mangues pour une somme de 700 000 CFA. Soit un prix de vente unitaire moyen de : 700 000 / 45 000 = 15,60 CFA. Un chiffre sensiblement inférieur à celui annoncé. Cependant, puisque 1/6 des fruits chargés à Niena sont détériorés au cours du transport, il convient de calculer le prix de vente unitaire moyen des mangues en bon état. On obtient ainsi : 700 000 / (45 000 – 1/6 * 45 000) = 18,70 CFA. Le tableau ci dessus retranscrit ces calculs pour chacun des 4 voyages.

Tableau 1

Nombre de mangues achetées

Prix d'achat unitaire

Prix de vente unitaire (1)

Prix de vente unitaire corrigé (2)

 Premier voyage

45 000

5 CFA

15,55 CFA

18,66 CFA

Deuxième voyage

32900

5 CFA

15,92 CFA

19,11 CFA

Troisième voyage

30322

5 CFA

16,9 CFA

20,28 CFA

Quatrième voyage

39000

5 CFA

10,48 CFA

12,57 CFA

 

 

 

 

 

Plusieurs constats s’imposent : tout d’abord, le prix de vente unitaire moyen (1) est significativement inférieur aux 20 CFA espéréx. Lors des prochains voyages, il est impératif que la CPMG fonde ses anticipations sur les chiffres indiqués ci-dessus. Ensuite, on s’aperçoit que le prix de vente unitaire corrigé (2) s’est apprécié continuellement au cours des trois premières opérations. On peut donc espérer que, plus la CPMG s’affichera comme un fournisseur fiable et régulier, plus l’AAM lui proposera des conditions d’achat intéressantes. Pour ce qui est du 4° voyage, les mangues acheminées ne correspondaient pas aux standards de Mopti, elles étaient d’une variété peu commercialisée ; il faut donc relativiser les mauvais résultats de cette opération. Ils traduisent seulement le manque d’expérience de la CPMG et nous sommes convaincus qu’un tel scénario ne se reproduira plus.

B.   Facteurs de risques

 Dans les paragraphes qui suivent, nous essaierons d’identifier les facteurs qui ont causé l’échec du commerce de mangues en 2006 et de discerner les éléments qui pourraient, dans l’avenir, mettre en péril la réussite des opérations.

1.      Un camion à moitié chargé

Intuitivement, on comprend qu’à chaque voyage le camion doit être entièrement rempli du fruit. Nous allons essayer de formaliser cette intuition. Les frais de transport, d’essence, de logistique, de restauration et les taxes sont à peu près identiques à chaque voyage. Le tableau ci dessous en témoigne.

Tableau 2

Coût Fixe

Premier voyage

437 900 CFA

Deuxième voyage

434 400 CFA

Troisième voyage

436 900 CFA

Quatrième voyage

465 400 CFA

 

 

 

Nous prendrons le parti de considérer ces charges comme des coûts fixes, c’est à dire des frais indépendants du nombre de mangues acheminées vers Mopti. Les mangues sont achetées au producteur au prix unitaire de 5 CFA puis sont revendues à Mopti au prix unitaire indiqué dans le Tableau 1 (3° colonne). On peut donc calculer la contribution de chaque fruit au résultat d’un voyage. Il suffit pour cela de soustraire le prix d’achat unitaire au prix de vente unitaire. On obtient les résultats suivants :

Tableau 3

Contribution d’un fruit au résultat du voyage (CFA)

 Premier voyage

10,55

Deuxième voyage

10,92

Troisième voyage

11,9

Quatrième voyage

5,48

 

 

 

 

A présent il nous reste à calculer le seuil de rentabilité de chaque voyage, c’est à dire le nombre de fruits acheminés à partir duquel la CPMG dégage un profit. Pour cela il faut diviser le montant des coûts fixes par la contribution unitaire de chaque mangue au chiffre d’affaire. On a :

Tableau 4

Nombre de mangues achetées

Seuil de rentabilité (nb mangues)

Premier voyage

45 000

41 507 

Deuxième voyage

32900

39 780 

Troisième voyage

30322

36 714 

Quatrième voyage

39000

84 927 

 

 

        

 

 

Les résultats sont frappants. Seul le premier voyage fut rentable or on constate que c’est également le seul voyage où le nombre de mangues acheminées par la CPMG était supérieur au seuil de rentabilité.  Par la suite, la coopérative n’a plus jamais été capable de s’assurer un approvisionnement suffisant pour couvrir ses coûts fixes. Il est donc impératif que la coopérative entreprenne un voyage uniquement lorsqu’elle a réuni suffisamment de fruits pour dépasser le seuil de rentabilité. Notons par ailleurs que pour garantir son approvisionnement, elle doit pouvoir payer ses fournisseurs au comptant.

Bien entendu le seuil de rentabilité d’une opération est d’autant plus faible que la qualité des mangues est bonne et le prix de vente élevé. La question de la qualité des fruits transportés vers Mopti est donc centrale.

2.      Des mangues de mauvaise qualité

Rappelons seulement que les conditions d’achat de l’AAM sont largement assujettis à la qualité des fruits proposés et que si les planteurs ne sont pas payés au comptant ils ne feront pas l’effort de récolter leurs meilleures mangues. Notons également que la CPMG manquait d’expérience dans le commerce de mangues et qu’elle ne savait pas quelles variétés de fruits étaient appréciées à Mopti. On peut résumer la problématique à deux constats : la CPMG n’avaient pas une trésorerie suffisante pour imposer ses conditions aux planteurs et elle ne connaissait pas le marché sur lequel elle avait choisi d’intervenir. La question de la trésorerie est fondamentale puisqu’en dépend la qualité et la quantité de l’approvisionnement.

3.      Une trésorerie insuffisante

 La CPMG traitent avec trois principaux partenaires : les planteurs, le loueur de camion et l’AAM. Chacun d’eux imposent des modalités de paiements différentes :

 -         la CPMG doit payer les planteurs au comptant si elle souhaite obtenir la bonne quantité et la bonne qualité de fruit
-         Le loueur de camion accepte d’être payé partiellement à crédit : une avance de 150 000 CFA lui est versé lors de la location, les 135 000 restant sont remboursés une fois que la CPMG a touché le produit de ses ventes à Mopti.
-         L’AAM achète les mangues à crédit

 Essayons de retracer les évolutions de la trésorerie de la CPMG au cours du premier voyage (cf. partie II). Vous trouverez le détail des calculs en annexe 2. On fera l’hypothèse que lorsque les membres de la coopérative repartent à Niena, ils n’ont encore rien perçu du produit de leur vente. En réalité il semble qu’ils touchent une petite partie de la somme, mais aucun chiffre ne nous a été transmis et, pour simplifier l’analyse, nous n’en tiendrons pas compte.  Vous trouverez ci-après un graphique retraçant l’évolution de la trésorerie de la CPMG (le détail des calculs figure en Annexe 2).

 

On constate qu’à la fin de la deuxième journée, une fois que l’avance sur la location du camion et les frais d’essence ont été payés, il ne reste plus que 137 000 CFA des 350 000 CFA initialement disponibles. Cela signifie que la CPMG, dès le premier voyage, n’a pas les moyens d’acheter son approvisionnement de mangues au comptant (3° jour, 225 000 CFA pour un camion intégralement chargé). Comme le paiement des produits de la vente est perçu entre le dixième et le quinzième jour, les dettes de la CPMG s’accumulent tout au long du voyage. Notons d’ailleurs que le solde de – 170 900 CFA obtenu au neuvième jour n’intègre pas le second versement de la location du camion (135 000 CFA).

Ainsi, lorsque la CPMG décide d’entreprendre un second voyage, elle est déjà endettée auprès du loueur de camion et des planteurs de mangues. Sa trésorerie épuisée, elle est obligée de payer à crédit le nouveau chargement de fruits et nous connaissons les inconvénients d’une pareille situation. Enfin, à cause de ce décalage temporel entre les recettes et les dépenses, la CPMG ne peut pas se constituer une réserve de sécurité pour faire face à d’éventuels imprévus.

4.      Les risques du voyage

 Comme nous l’avons déjà évoqué, la mangue est un fruit périssable et tout délai dans le chargement ou l’acheminement peut entraîner la perte du stock. De plus, la mangue est un fruit fragile et les chocs qu’elle subit lors de la récolte ou du transport accélèrent son pourrissement.  Les risques liés au voyage sont donc considérables. Si le camion tombe en panne (ne serait-ce qu’un jour ou deux) c’est toute l’opération qui échoue. Or si les routes au Mali ne sont pas toujours en bon état, les pistes qui mènent aux champs des planteurs sont encore pires. Les ornières sont un danger pour les véhicules, les cahots endommagent les fruits et le temps perdu à rouler sur des pistes en mauvais état met en danger l’intégralité du chargement. Des mesures devront donc être prises pour faciliter l’accès des camions aux plantations de mangues.

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Dernière modification : 14 janvier 2014