Accueil Remonter                       
Santé
Maison artisanat ] L'assainissement ] Les déchets ] L'écologie ] [ Santé ] Karangasso ] L'éducation ] Femmes et agriculture ] L'informatique ] Conclusion ]

 

 

   Mentalités et tradition : un frein au développement sanitaire

Durant notre séjour à Niéna, une question revenait souvent dans nos discussions avec les habitants du village : le poids de la tradition, et en quoi celui-ci peut constituer un frein au développement, notamment dans le domaine de la santé. Les femmes, principales victimes de ce problème, ne s’expriment pas sur le sujet, par gêne et surtout parce qu’elles n’ont pas l’habitude de donner leur avis. Nous avons donc parlé avec des hommes mais également avec les trois matrones du centre de santé de Niéna.

 De ces discussions découlèrent trois sujets principaux : l’excision, dont la pratique n’est pas sans risques, la contraception, encore très peu utilisée, et le sida, fléau présent à Niéna comme dans le reste de l’Afrique.

I) L’excision

Le problème de l’excision a donné lieu à de nombreux débats. L’argument qu’avancent les hommes Niénakas pour justifier sa pratique est qu’une femme non excisée attendrait plus de son mari qu’il ne pourrait en donner, étant la plupart du temps polygame et devant donc remplir ses devoirs conjugaux autant avec chacune de ses femmes ( dont le nombre, au Mali, peut aller jusqu’à quatre). Insatisfaite, celle-ci risquerait d’aller " voir ailleurs " et tromper son mari. Un argument s’avérant…très discutable, bien entendu.

La pratique de l’excision trouve son origine dans un mélange de superstitions, de tradition ancestrale et de religion, celle-ci étant censée éloigner le mauvais sort, la maladie, la folie, la stérilité et même favoriser la naissance des fils si précieux. Premières concernées, les femmes ont du mal à s’exprimer sur la question : l’excision est une tradition et une femme non excisée serait rejetée par la communauté et jugée impure. Pourtant, les matrones de Niéna admettent que l’excision est une pratique dangereuse qui donne lieu à beaucoup de saignements. Mais l’avis médical est ici impuissant face à la tradition.

L’opération doit être pratiquée par un forgeron. Il y a encore une vingtaine d’années, l’excision se pratiquait à l’âge de 18/20 ans, durant le mois précédant le mariage. Aujourd’hui, elle se fait au courant du mois qui suit la naissance.

On estime à 130 millions le nombre de filles et de femmes qui ont subi cette pratique, et qu’au moins deux millions de filles par an risquent de subir cette procédure.

II) La contraception

Autre problème lié aux contraintes sociales et à la tradition, le refus de la contraception est largement majoritaire à Niéna. Son utilisation permettrait de réduire le nombre de grossesses rapprochées, dangereuses pour les femmes, ainsi que le nombre de grossesses non désirées. Au Mali, la moyenne d’enfants par femme est de sept.

Les matrones nous disent que beaucoup de maris interdisent la contraception à leurs femmes. Son utilisation est jugée contraire à la religion et reste incompatible avec les mentalités : le principal but de la personne humaine étant de procréer, mettre un frein à la procréation est jugé contre nature et totalement immoral. Petit à petit, les mentalités commencent à changer : certaines femmes de Niéna prennent la pilule contraceptive, et l’utilisation de préservatifs se fait de moins en moins rare (ce sont principalement des jeunes qui les utilisent). Un autre problème est que, souvent, les femmes ne connaissent pas la contraception.

Pour remédier à ce problème, les matrones du centre de santé de Niéna organisent deux fois par semaine des " causeries ", permettant de sensibiliser les femmes, et les rares hommes qui acceptent de venir, aux différents moyens de contraception : préservatifs et pilules (une plaquette coûte 100 francs CFA c’est à dire 1FF). Lors de ces causeries, se font également des discussions sur l’importance des consultations prénatales, le danger des grossesses rapprochées…

II) Le sida

Le sida existe à Niéna, d’autant plus que la route qui va de Bamako à Abidjan traverse le village, qui se retrouve ainsi un lieu de passage pour toutes sortes de gens.

Le nombre de séropositifs est difficile à définir, car très peu de personnes font le test de dépistage et toute maladie grave est prise pour le paludisme. De plus, les Maliens sont profondément animistes et pensent par conséquent que la cause d’une maladie grave est un mauvais sort, une punition de Dieu, croyant peu à une raison scientifique de la maladie.

La question du sida reste en tous cas un sujet tabou. Seul les jeunes abordent le sujet entre eux. La sensibilisation à cette maladie est active et de nombreuses ONG parcourent la région et distribuent des prospectus et des préservatifs, tout en organisant des discussions autour du sujet. Sur Radio Teriya, la radio locale créée par l’association Teriya Amitié Mali, des programmes de sensibilisation avec des interviews d’infirmiers du centre de santé sont régulièrement diffusés.

Mais pour les générations plus âgées, le Sida reste une maladie inventée par les Américains pour s’enrichir…

horizontal rule

 

Dernière modification : 14 janvier 2014